COP25 – Relativiser l’échec

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La Convention-cadre des Nations Unies sur les changements climatiques (CCNUCC) organisait, sous la présidence du Chili, sa 25e Conférence des parties (COP) en décembre dernier à Madrid. Depuis 1995, les pays se rencontrent pour s’attaquer à la question de la crise climatique. Bien que des engagements ambitieux aient été conclus, que ce soit le Protocole de Kyoto ou l’Accord de Paris, les gaz à effet de serre (GES) ne cessent d’augmenter.

Cette 25e COP était pour plusieurs la rencontre de la dernière chance. D’abord parce que le Groupe d’experts intergouvernemental sur l’évolution du climat (GIEC) a indiqué, dans sa mise à jour publiée en 2018 de l’état du réchauffement climatique pour guider les discussions de la COP24 qui se tenait en Pologne, que, hors de tout doute, les efforts des États était nettement insuffisants pour atteindre les cibles de l’Accord de Paris. Mais que le maintien du réchauffement en deçà de 1,5°C était encore possible. Pour ce faire, les États devront être plus ambitieux dans leurs plans et augmenter leurs cibles de réduction de GES à 45 % d’ici 2030. D’autre part, la COP25 était la dernière occasion d’adopter les mécanismes pour permettre l’entrée en vigueur de l’Accord de Paris en 2020.

Depuis la ratification de l’Accord de Paris, les États disposaient de cinq ans pour mettre en œuvre les mécanismes de l’accord. Malgré des avancées importantes, comme le guide de mise en œuvre, certains articles demeurent en suspens. C’est le cas de l’article 6 qui traite de la finance climatique, mais surtout des mécanismes liés aux pertes et dommages. C’est là où l’échec a été retentissant, les États étant incapables de s’entendre sur ces derniers mécanismes. Cela ne signifie pas pour autant un échec total. Mais, en tenant compte des avertissements du GIEC, cela ne fait que ralentir encore plus les travaux et nous éloigne encore plus de l’atteinte des cibles de l’Accord de Paris.

Crédit photo: Patrick Rondeau

Cependant, il faut relativiser cet échec. Tout d’abord, les COP se déroulent dans un cadre rigide où les décisions sont lentes. De surcroît, la CCNUCC fonctionne sous la règle du consensus. Il suffit qu’un seul pays s’oppose à une proposition pour que les travaux soient bloqués. Et ce fut le cas lors de cette COP. Sur les 195 pays présents, environ quatre ont bloqué le dénouement des travaux sur les articles en suspens. Pourtant, tous les autres étaient prêts à trouver une voie de passage.

Crédit photo: Patrick Rondeau

C’était également l’occasion pour les parties de faire part de leurs plans pour atteindre la carboneutralité d’ici 2050. L’Union européenne, à l’exception de la Pologne, s’est engagée à atteindre la carboneutralité d’ici 2050. Ce n’est pas rien, mais cela est passé complètement inaperçu face à l’attitude de fermeture des États-Unis et de l’Arabie Saoudite.

Avec du recul, il pourrait être à propos de nous poser la question à savoir si nous devons mettre tous nos espoirs sur les épaules des négociateurs à la COP. Peut-être est-ce là l’erreur? Ces instances servent à adopter des plans, des protocoles, des accords et à négocier les mécanismes s’y rattachant. Cela étant, ce n’est pas à ces endroits que se décideront les plans les plus ambitieux dont nous avons besoin.

Au-delà des pays représentés aux COP, il y a aussi neuf constituantes reconnues par la CCNUCC. Les syndicats font partie d’une de ces constituantes. Un des gains importants lors de cette COP fut l’effort concerté de la part des diverses constituantes pour travailler ensemble. Cela n’est pas banal. Jamais ces constituantes n’avaient autant travaillé ensemble. Elles se sont mobilisées, entre autres, face à la répression de la présidence chilienne, lors d’une manifestation dans les murs de la COP demandant aux États d’accélérer le processus de négociation. Il est clair que la société civile se mobilise et se fait de plus en plus entendre. À titre d’exemple, 500 000 personnes ont pris la rue à Madrid, durant la COP.

La FTQ, quant à elle, est présente depuis 2015 aux différentes COP, multipliant les efforts pour faire entendre la voix des travailleurs et des travailleuses du Québec ainsi que le concept de la transition juste. Lors des COP, elle est présente dans les rencontres de caucus de la Confédération syndicale internationale, du Réseau Action Climat Canada et celle de l’équipe de négociation du gouvernement canadien. Elle offre un soutien aux négociateurs canadiens au Forum on Response Measures, lieu où sont négociées les questions de la transition juste et de la diversification de l’économie.

Malheureusement, bien que certains pays fassent preuve d’audace face à la lutte contre les changements climatiques, on ne peut en dire autant du gouvernement canadien. Le Canada s’est présenté en véritable sauveur en 2015, mais son lustre s’est égratigné au cours des dernières années. L’achat d’un oléoduc avec les fonds publics et le financement à coups de milliards de dollars de l’exploitation des hydrocarbures démontrent le double discours du gouvernement Trudeau. Le Canada est l’un des pays les plus polluant per capita de tout le G20. À titre d’exemple, un Canadien produit cinq fois plus de GES qu’un Mexicain et près de neuf fois plus qu’un Indien.