Cet éditorial est paru dans le no134 du Monde ouvrier
Avec la reprise des travaux parlementaires, la FTQ souhaite rappeler au ministre Boulet son engagement à moderniser la Loi sur la santé et la sécurité du travail (LSST). Une promesse qui se fait attendre et qui aurait pu sauver des vies en pleine crise de la COVID-19. Il est devenu impératif de remettre ce projet de loi au-dessus de la pile des travaux parlementaires.
Une loi dépassée !
Rappelons que moins de 12 % des personnes travaillant au Québec ont accès à l’ensemble des mécanismes de prévention prévu à la LSST. Ces mécanismes, qui consistent en la nomination d’un représentant à la prévention, à l’élaboration de programmes de prévention et de santé et à la mise sur pied d’un comité de santé et de sécurité, permettent d’assurer un milieu sain et exempt de danger.
Malheureusement, cette loi élaborée il y a 40 ans déjà, est complètement dépassée et déconnectée de la réalité des milieux de travail d’aujourd’hui. On y retrouve par ailleurs plus d’une aberration. Un exemple ? Le secteur de la construction attend toujours que les articles qui le visent soient mis en vigueur, alors que c’est le secteur où il y a le plus de décès par an !
À l’heure actuelle, ce sont les travailleurs et les travailleuses du milieu de l’éducation et de la santé, milieu à prédominance féminine, qui sont à haut risque. La pandémie a mis en lumière l’écart entre les milieux de travail jugés prioritaires et ceux qui ne sont pas couverts par la loi en ce qui a trait aux moyens à mettre en place pour s’ajuster et faire face à la crise. Les secteurs prioritaires ont rapidement été capables de s’adapter aux nouvelles exigences sanitaires parce que l’organisation du milieu de travail prévoyait déjà des moyens de communication et d’intervention en SST. Or, lorsqu’aucune structure n’est mise en place, comme c’est le cas dans le réseau de la santé et de l’éducation, les acteurs de ces milieux font face à directives contradictoires, des mesures de protection variables et des situations qui les mettent à risque. À la veille d’une deuxième vague, il est primordial que ces secteurs aient rapidement accès aux mécanismes de prévention en santé et sécurité.
Des mécanismes qui ont fait leurs preuves et des économies de bouts de chandelles
Il y a trop longtemps que la FTQ revendique l’application de l’ensemble des mécanismes de prévention à tous les secteurs d’activité. On nous a trop souvent servi l’argument des coûts excessifs. Pourtant, on peut lire dans le rapport du Vérificateur général du Québec, publié en mai 2019, que chaque dollar investi en prévention peut faire économiser jusqu’à 10 $ en indemnisation des lésions professionnelles.
Ne rien faire coute donc plus cher et surtout, coute des vies. Dans le secteur minier, avant l’instauration des mécanismes de prévention en 1979, il y avait en moyenne 20 décès par année. Aujourd’hui, on compte entre une et deux personnes qui y décèdent par année. C’est encore trop, mais c’est une baisse de 80 %, grandement due aux changements que les comités de travail ont pu réaliser à la suite de la mise en application de la loi.
Il est temps que le gouvernement démontre sa volonté de protéger la vie des Québécois et des Québécoises et s’assure que tous les mécanismes de prévention présentement prévus à la LSST, notamment la mise sur pied de comités de santé et de sécurité du travail, soient applicables à l’ensemble des milieux de travail.
Ça fait 40 ans que l’inaction gouvernementale tue des travailleurs et des travailleuses. En 2019, c’est 190 personnes qui ont perdu la vie à cause de leur travail. En 2020, ce sera combien ? On ne peut plus attendre.
Solidairement,
Le président, Daniel Boyer
Le secrétaire général, Denis Bolduc